Gregori Volokhine, Président de Meeschaert Financial Services
New York
Hier matin, les Etats-Unis se sont réveillés après un séisme politique que beaucoup n’avaient pas anticipé. Donald Trump Président, les cartes sont redistribuées. Après huit ans d’une administration Obama, l’économie américaine a surmonté la crise financière de 2008, retrouvé le plein emploi et un rythme de croissance relativement satisfaisant. Pourquoi ce vote de rejet et d’où vient ce profond malaise ?
Le choix de la majorité silencieuse, la « middle class »
En près de 20 ans, le pouvoir d’achat de la classe moyenne américaine n’a pas augmenté. Parallèlement, les Américains font face à une explosion des coûts de la santé et de l’éducation, à une constante insécurité de l’emploi et à l’impossibilité d’économiser pour leurs retraites. La relance de l’économie sur les huit dernières années, principalement causée par la politique accommodante de la Réserve fédérale, a creusé les inégalités. Ce sont les actifs financiers qui en ont profité. Or près de 60 % du total de ces actifs sont détenus par 1 % des plus privilégiés.
Au même moment, le parti démocrate, qui s’appuyait traditionnellement sur une base syndicale et populaire, est devenu l’image même du statu quo et d’une élite cramponnée à ses avantages. La candidature d’Hillary Clinton est apparue comme déconnectée des préoccupations quotidiennes d’une grande partie de la population. Donald Trump a su le souligner et l’exploiter. Son discours populiste est arrivé à un moment charnière, que l’on connaît aussi en Europe. Sans revenir sur les outrances du langage de ce dernier, examinons comment une administration Trump pourra relever les défis actuels, nationaux et globaux.
Une politique économique centrée sur l’Amérique
Hier, les Américains ont non seulement élu un président républicain, mais également renouvelé la majorité républicaine des deux chambres, le Sénat et le Congrès. Après des années de blocage découlant du partage du pouvoir entre les deux partis, la majorité républicaine va pouvoir appliquer les réformes structurelles qu’elle estime nécessaires à une relance de l’économie.
Une politique fiscale agressive
Pour relancer la consommation, Donald Trump souhaite baisser l’impôt sur le revenu. Pour encourager les investissements des entreprises, le président élu réduira l’impôt sur les sociétés de 35 % à 15 %. Il a également promis l’amnistie fiscale, permettant ainsi aux compagnies américaines de rapatrier plus de 3 000 milliards de dollars détenus à l’étranger, qui seront réinvestis dans l’économie américaine.
La restructuration de l’Obamacare
L’Obamacare, le plan d’assurance santé subventionnée par l’Etat, qui a amené une augmentation des primes d’assurances de plus de 20 % pour ses membres, va être totalement refondu.
L’assouplissement de la réglementation
Un frein sera mis à l’intervention de l’Etat dans la règlementation de secteurs entiers de l’économie : la finance, par exemple, retrouvera un niveau de rentabilité essentiel pour jouer son rôle dans la société.
La valorisation des infrastructures
Aux Etats-Unis, contrairement à la plupart des pays européens, les investissements dans les infrastructures sont traditionnellement à la charge des communautés locales. Donald Trump souhaite que l’Etat investisse plus de 250 milliards de dollars dans les infrastructures.
Comment se positionner sur les marchés ?
Le marché américain a connu une hausse pratiquement ininterrompue ces sept dernières années. Les niveaux de valorisation ont dépassé les moyennes historiques. Faut-il s’en inquiéter ? La réponse dépendra de la rapidité et du succès du programme de relance de l’économie envisagée.
Une accélération de la croissance devrait entraîner une nette amélioration des revenus et des profits des entreprises, normalisant leur niveau de valorisation et permettant aux indices de progresser.
Le risque principal viendrait d’une poussée inflationniste qui encouragerait la Réserve fédérale à augmenter les taux d’intérêt plus rapidement que l’économie ne pourrait le supporter. Il faut mettre au crédit de la Réserve fédérale américaine son extrême prudence à resserrer sa politique monétaire jusqu’à présent.
Nous anticipons un environnement favorable aux actions qui reflèteront la reflation de l’économie. Les instruments obligataires devraient en revanche perdre de leur attrait, dans un cycle de croissance renouvelée.
Le choc que nous avons vécu aux Etats-Unis aura des conséquences globales à long-terme sur l’ensemble des marchés financiers. La vitalité et la force de renouvellement de l’économie américaine l’emporteront sans doute sur les risques d’un discours populiste qui ne devrait pas se traduire dans les faits.
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