Damien Charlet, Directeur de la Gestion sous mandat, Meeschaert Asset Management
Les marchés ont-ils perdu la tête ? Est-ce le calme avant la tempête ? Ou au contraire ce semblant de sérénité retrouvée s’explique-t-il par la juste prise de conscience que les économies mondiales se portent finalement plutôt bien ?
Des indicateurs économiques globalement bien orientés
Au début de cette année, alors que les indices perdaient jusqu’à 20 % et que les scénarii les plus noirs recommençaient à apparaître, nous vous exposions notre perception en soulignant l’amélioration des fondamentaux depuis 2011 et le manque de justification réelle de la baisse. Aujourd’hui la situation n’a pas beaucoup changé. Aux Etats-Unis, le plein emploi pourrait commencer à produire ses effets. En Asie, notamment en Chine, la consommation demeure dynamique (les immatriculations de voitures neuves sont encore en hausse de plus de 20 % sur les quatre derniers mois). En Europe, fait rare depuis quelque temps, la croissance 2017 a été récemment révisée positivement par le FMI.
D’un point de vue économique, la bonne tenue actuelle des marchés ne semble donc pas aberrante.
La remontée des taux d’intérêt
Aux Etats-Unis, poussés par des perspectives d’inflation en hausse – plein emploi et politique économique, relance budgétaire et baisses d’impôts voulus par Donald Trump – les taux d’intérêt remontent enfin. Ils entraînent dans leur sillage les taux européens. Ceux-là avaient commencé à augmenter dès l’été, tirés par les propos de la BCE qui remettait en cause l’efficacité des taux négatifs et incitait les Etats à mettre en place des politiques de relance.
Cette tendance va-t-elle se poursuivre ? Aux Etats-Unis, si l’économie accélère, sans doute. En Europe, si les taux montent trop haut, le risque est de compromettre un éventuel rebond économique encouragé par la BCE. Les obligations, paradoxalement surtout les moins risquées, souffrent du relèvement des taux mais il nous paraît difficile à ce stade d’envisager un choc sur les obligations européennes.
Le faux semblant de l’évolution des indices actions européens
Depuis neuf mois jusqu’à la semaine dernière, les indices européens faisaient du surplace. En réalité, des pans entiers de la cote ont bougé violemment. Les valeurs traditionnellement défensives, dites de croissance, internationales et devenues assez chères, sont délaissées et leur valorisation relative chute. Les valeurs cycliques, en général peu chères, ont en revanche très fortement rebondi. Les investisseurs rééquilibrent donc leurs portefeuilles au profit des actions traditionnellement perçues comme plus à risque : minières et matières premières, industrielles et chimiques, financières. Selon ce même raisonnement, la hausse des taux s’est accompagnée d’une chute, très exagérée à notre sens, des valeurs distribuant d’importants dividendes (télécoms, services publics).
Un récent rebond surprenant ?
La valorisation des actions européennes est revenue au niveau moyen de ces trois dernières années. Le discours des entreprises et les tendances, macro et micro économiques, sont plutôt mieux orientés que prévu. Les actions sont donc à un prix d’équilibre logique. L’accélération des derniers jours nous ramène aux fondamentaux économiques et laisse de côté le risque politique avec lequel nous apprenons à vivre depuis quelques années.
Pour que le rebond se poursuive durablement, il faudra néanmoins que les résultats des entreprises montrent des signes de reprise.
Les mandats, reflet de cet optimisme prudent
Investi en actions, sans être particulièrement agressif, hormis le pari bancaire effectué fin 2015-début 2016 un peu prématurément mais finalement à bon escient, le cœur des portefeuilles demeure concentré sur des valeurs patrimoniales peu cycliques mais également peu chères. Après la violente rotation sectorielle du 2e semestre 2016, il nous semblerait logique que leur comportement relatif soit meilleur en 2017. L’allocation taux variables a été renforcée avant l’été. Aussi, augmentons-nous la diversification de la partie taux en fin d’année afin de limiter la sensibilité à une potentielle poursuite, même modeste, de la hausse des taux en zone Euro.
En conclusion si la visibilité globale demeure médiocre, c’est un contexte que nous avons appris à gérer depuis 2008. Les fondamentaux semblent plutôt sains et c’est sur cela que nous fondons notre stratégie d’investissement à moyen terme.